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5 juillet 2010

Un recueil venu d'ailleurs

J’ai lu pour ne pas dire braconné ce livre à petit pas, d’un texte à un autre, j’ai souvent perdu mon latin, bousculé par des mots venus du cœur d’un poète vers ses proches, un clin d’œil par ci et par là à des illustres personnages, ces textes se lisent comme des dessins en trompe l’œil.

C’est étrange, troublant et même déstabilisant de se plonger dans cette poésie d’ailleurs, on admire sans vraiment se douter ce qui se cache derrière ces poèmes, et pourtant on ressent ô combien l’humain pur et chaleureux, amitieux et généreux tout le long du recueil.

La plume de Gilles Durieux devient des ciseaux d’argent taillant le roc brut, texte après texte, se dévoile une facette puis une autre où la lumière vient s’y mirer en toute simplicité mais avec une authenticité tel que ce roc se mue en un diamant pur et admirablement travaillé.

Des textes à l’odeur d’un vécu, d’un personnage haut d’estime, sincère qui ne fait pas de manière.

Ne tentez pas de mettre une étiquette sur cette poésie, ni forme ni principe, c’est la poésie de Gille Durieux : belle et chantante, bousculant nos aprioris poétiques, un langage unique pour un poète atypique …

Les mots en offrande se chahutent dans les vers, les rimes n’en font qu’à leur tête, et le tout : devient un joyeux mélange savoureux et original qui surprend certes mais nous offre un vent nouveau aux embruns vivifiants…

Tout un recueil qui ressemble aux vagues frappant les récifs, l’écume nous laisse rêveur, le bruit fracassant nous rend un peu pantois, alors que la fraîcheur nous laisse en éveil près à affronter la prochaine déferlante.

Une poésie qui swingue, caracole et fanfaronne, sous un petit air américain, il faut avoir le pied marin, et vogue ce joyeux rafiot vers une lecture d’aventure.

Chapeau bas Monsieur Durieux !

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30 juin 2010

Un roman percutant

Petite Abeille, Sarah … deux femmes, deux cultures opposées, rien qui pourrait les rassembler, et pourtant… faute de sauver son couple lors d’une escapade au Nigéria, Sarah fera bien mieux : elle sauvera la vie de Petite Abeille fuyant avec sa sœur l’horreur d’un certain génocide déguisé… Sarah contrairement à son mari n’hésite pas une seconde…cette seconde décisive où le destin bascule à tout jamais

Le roman se dessine en mosaïque : l’histoire de Petite Abeille percute le chemin de Sarah, dès lors leur vie vole en éclats… chaque pièce est soigneusement posée alternativement par l’une et l’autre des deux femmes… afin de reconstituer l’histoire de chacune d’elles, l’une qui vient au secours de l’autre, puis inversement comme une invite à ne pas sombrer à tout jamais vers une issue fatale… Petite Abeille nous révèle les drames de son pays, sa fuite, et les conditions des réfugiés …La confrontation de deux civilisations aussi différentes provoque forcément des situations plus ou moins dramatiques mais aussi loufoques et ironiques voire improbables. C’est sans doute ce qui sauvera Petite Abeille dans ce pays où “: il faut être jolie ou parler joliment” pour espérer être accepté … Petite Abeille opte pour la deuxième solution : l’Anglais de la Reine, qu’elle s’évertue à maîtriser ce qui ne manque pas toujours d’être comique… mais on ne peut que s’incliner face à sa persévérance, son courage et son optimisme.

En écho, Sarah nous livre son histoire, sa rencontre avec Petite Abeille mais aussi son couple qui bat de l’aile, son travail qui ne correspond plus à ses attentes, elle ne sait plus faire semblant de ne pas savoir ce qui se passe au Nigéria tant que dans tous ces pays en voie de développement… De drame en drame, elle finit par prendre la décision de protéger Petite Abeille faute de ne pouvoir changer le monde…

Ce roman se joue donc sur deux tableaux, et nous dévoile plus d’une facette… Cette construction du roman est originale, et le fait de nous révéler par brides les événements de l’une et de l’autre, nous plonge dans une intrigue intéressante. De rebondissement en rebondissement, la mosaïque prend forme et nous livre une histoire bien que dramatique fort poignante et émouvante.

Quant aux autres sujets proposés comme : l’infidélité, ils deviennent presque insignifiants face à l’atrocité du vécu de Petite Abeille et dérisoires à côté de la situation que vivent au quotidien les réfugiés et les sans-papiers… il est vrai que pris à part, chaque événement est important mais mis côte à côte, forcément l’un l’emporte sur l’autre et là surgissent toutes les questions personnelles : y-t-il lieu de faire un drame de son mal-être au quotidien alors qu’à notre porte, des vies sont complètement anéanties, meurtries, bafouées, pour ne pas dire ignorées, passées sous silence ces conditions inhumaines ….elles devraient nous révolter et nous mobiliser au lieu de se lamenter sur le sort d’une infidélité, sur son boulot qui devient qu’une routine etc …

En résumé :

Un roman qui met à la lumière les points bien sombres de notre civilisation…

Une belle lecture, des personnages attachants parfois marrants, émouvants : j’ai beaucoup apprécié ce roman à deux voix et approuvé les choix de Sarah vis-à-vis de Petite Abeille , mettant en veille sa carrière mais profitant de son expérience et de son courage pour la sauver elle et bien d’autres petites abeilles en détresse… une goutte d’eau dans la mer, mais une goute et une goutte ça finit par compter… ce qui est contradictoire car c’est bien une goutte d’eau qui a fait déborder le vase de Sarah … ne négligeons pas l’infime qui peut tout faire basculer vers l’extrême …

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2 juin 2010

Un livre remarquable

Un petit roman superbe malgré la tragédie qui se joue comme fil d’Ariane du début à la fin par l’enterrement d’un adolescent mort accidentellement lors d’une plongée. Paulot, beau-père du défunt nous livre par le biais de ce drame, sa propre histoire, ce face à face avec son existence, il nous plonge non dans le grand bleu mais dans les profondeurs de l’être humain.

Nous parcourons ce jour d’enterrement de l’aube à l’adieu final, et l’émotion va crescendo à la mesure des mots de Paulot qui se livre au grand jour, ce jour est aussi le bilan de sa vie, la révélation tardive de cet amour paternel, sa vision de cette île, toute une panoplie de sentiments, de réflexions, un roman très riche et écrit magnifiquement.