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    8 décembre 2018

    Paris, janvier 1393. Mort et nu, tel est retrouvé Messire Jehan, tout près de la Grande Boucherie. Mais avant d'être déposé là parmi les ordures, le vieil homme avait passé la soirée aux étuves de la rue Tirechappe, chez Isabelle la Maquerelle, un endroit mal famé où il s'était diverti d'alcool, de bonne chair et de jolies filles.
    Quand Constance, sa jeune épouse, apprend de la bouche de son amie, Valentine Visconti, belle-sœur du roi, l'assassinat de son époux, elle est effondrée. Cet homme qu'elle respectait l'avait sauvée de la misère pour lui offrir une vie digne et protégée. Mais au chagrin succède immédiatement la soif de vengeance. Constance est décidée : elle va démasquer les meurtriers de Jehan et, sa mission accomplie, entrer dans les ordres. Il se trouve que Jehan n'était pas aux étuves pour prendre du plaisir mais qu'il enquêtait sur un trafic de fausse monnaie pour le compte du Trésor. Qu'à cela ne tienne ! Constance démantèlera le réseau et fera arrêter les assassins ! Mais pour cela, il lui faut s'introduire aux étuves et il est hors de question pour elle de vendre ses charmes. Bien qu'elle n'y connaisse rien en la matière, elle passera par les cuisines. Jehan, qui voulait faire d'elle une parfaite épouse, lui a laissé un recueil de recettes. Après un peu d'exercices, Constance intègre les cuisines des étuves, au grand dam de Guillaume de Savoisy, le chef en titre qui ne tolère pas la concurrence. C'est le début d'une nouvelle vie, plus aventureuse, pour la jeune veuve qui devra affronter mille dangers.

    Un petit polar historique et gastronomique qui nous promène dans le Paris moyenâgeux et nous fait même voyager vers la belle ville de Bruges. Alors bien sûr, le propos de Michèle Barrière n'est pas de nous servir un suspens haletant. Le tueur est très vite identifié et l'enquête n'est pas palpitante. Non, l'intérêt n'est pas dans la dimension polar du roman, le but est plutôt gastronomique. La cuisine très épicée du Moyen-Âge est à l'honneur : mouton au miel, tourte d'espinoches, potage jaunet, pintade aux noisettes, etc. L'auteure maîtrise son sujet et sait titiller nos papilles avec des recettes (dévoilées à la fin du livre) qui semblent aussi exotiques que savoureuses. L'aspect historique est bien mené lui aussi. Nous sommes en 1393, sous le règne de Charles VI, surnommé le Bien-aimé malgré ses crises de folie qui inquiètent et déstabilisent le royaume. Et puis, Paris à cette époque vaut le détour. Michèle Barrière raconte les ruelles sombres et crasseuses, les petits voleurs, l'odeur des rôtisseries, le manque d'hygiène, la misère de certains et l'opulence d'autres. L'incursion à Bruges est très plaisante aussi. La ville marchande, véritable plaque tournante du commerce mondial, dévoile le charme de ses petites places, de ses magasins d'étoffes et de ses coutumes.
    Par contre, les personnages ne sont pas assez travaillés et plutôt caricaturaux avec les méchants d'un côté, les gentils de l'autre, une héroïne qui passe très vite du statut de potiche décorative à celui d'aventurière intrépide et l'inévitable histoire d'amour qui flirte avec l'eau de rose.
    En bref, un roman sans autre prétention que de divertir et d'instruire, une bonne combinaison.