L'Amie de nos amis
EAN13
9782812600609
ISBN
978-2-8126-0060-9
Éditeur
Le Rouergue
Date de publication
Collection
La Brune au Rouergue
Nombre de pages
296
Dimensions
15 x 2,2 cm
Langue
français
Langue d'origine
italien
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Ce roman s'articule autour d'un personnage de femme fatale au cœur d'une intrigue fertile en rebondissements. "L'Amie de nos amis", hommage à Chandler, qui explore la mafia italo-américaine de New York au début des années 1970, est aussi un grand classique du polar à l'italienne, inédit en français.
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Introduction

par Marcello Fois

Il existe plusieurs bonnes raisons de lire, de commencer à lire ou de continuer de lire les romans d’Attilio Veraldi. Avant tout, dans une époque de revanchisme du « Noir » italien, l’œuvre de l’auteur napolitain constitue un passage obligé comme celle de Scerbanenco et Fruttero & Lucentini. Il représente une pointe de ce trident qui a ouvert de nombreuses voies à la génération d’écrivains à laquelle j’ai le sentiment d’appartenir. Le fait qu’on ait tendance à l’oublier, ou qu’il soit scientifiquement négligé dans les diverses et souvent narcissiques célébrations littéraires qui remplissent les agendas des auteurs les plus en vue, ne peut avoir qu’une signification : on n’est jamais assez généreux avec ses pères. Mais, peu importe, un éditeur intelligent a enfin décidé de ramener Veraldi là où il doit être : dans les rayons des librairies. Écrire à sa demande quelques pages d’introduction à un de ses livres est pour moi un honneur.
Une des raisons de redécouvrir Attilio Veraldi concerne un fait établi : Attilio Veraldi a contribué à créer une « grammaire du polar à l’italienne ». Cela paraîtra peut-être risible à tous ceux qui considèrent encore le polar comme un genre mineur. Et s’ils s’obstinent dans cette conviction, c’est aussi parce qu’ils n’ont jamais lu cet auteur. Dès ses débuts, Veraldi a été un auteur de premier plan. Il a tout de suite compris qu’il vivait dans un pays de mystères, dans une ville, Naples, qui constituait une toile de fond aussi foi- sonnante que New York ou Los Angeles. Il a tout de suite compris qu’il était plus provincial de mimer des réalités inconnues que de se déclarer ouvertement provincial.

Plus encore, quand on lit Veraldi, on a la sensation de percevoir, et cela très fréquemment, la simple et immuable complexité de la société dans laquelle nous vivons : l’absurdité du mal qui, dans une connotation laïque, vise à éclairer l’incapacité du bien; le cursus honorum d’une classe politique plus cynique que le citoyen ; l’abominable morgue d’une bourgeoisie qui feint d’être investie d’une autorité morale, dût-elle conclure des pactes avec le diable.
Nous vivons dans un pays de mystères. Nous vivons dans un pays dont la surface n’est qu’une pâle image de ce qui se meut en profondeur. Et nous vivons dans une nation non-nation. Veraldi l’avait déjà compris. Avant même que nous nous considérions trop « installés » pour saisir les raisons de l’immigration, il nous décrit, dans L’Amie de nos amis justement, une Amérique regorgeant d’Al, Sal, Frankie et Tony. Des émigrés italiens. De ces émigrés qui, arrivés en Amérique, avaient découvert « primo, que ces fameuses rues non seulement n’étaient pas pavées d’or, mais n’étaient pas pavées du tout, et deuzio, que ce serait à eux de les paver ». Exactement ce que pourraient dire un Albanais ou un Nigérien débarquant dans cette Italie promue au rang d’Eldorado de la globalisation cathodique et autre.
L’Amie de nos amis est un roman très particulier, un roman « américain ». Plus proche des Soprano’s que de Puzo. Le roman d’une Amérique qu’on ne peut raconter qu’à travers le regard très italien, ou, devrais-je dire, très napolitain, du commissaire Corrado Apicella. Un personnage qui refuse d’accomplir son devoir de pas- seur dans un autre univers et qui, à travers ce refus, ou plutôt, en vertu de ce refus, nous aide à comprendre que la possibilité de coexistence réside dans la différence et dans la conscience de la différence.
Je crois que les grands écrivains servent à cela : à nous indiquer les voies de la communication plutôt que celles du silence. Fort de son rôle fermement identitaire, Apicella laisse entendre qu’il est enclin à l’écoute. C’est un personnage qui n’a pas besoin de prouver quoi que ce soit et, pour cette raison même, un homme qui vit l’Autre et l’Ailleurs avec une grande, une humble curiosité. Dans L’Amie de nos amis, on ne trouvera rien de prévu, rien de pittoresque : New
York est New York, simplement un autre endroit, étonnamment grand, surpeuplé, multicolore. Et si l’on disait à Apicella que c’est le plus bel endroit du monde, il répondrait que, pour l’établir, il faudrait avoir vu le monde entier ; en ce qui le concerne, il lui suffit de penser au golfe de Naples pour se sentir ragaillardi.
C’est justement lorsqu’elle nous décrit les différences que la plume de Veraldi donne le meilleur d’elle-même. Dominick Diobene, un des personnages clés de cet extraordinaire roman, est un fin connaisseur en la matière, au point qu’il dit en se décrivant et en décrivant ses études en Italie : « L’Italie vivait alors un miracle, elle s’était rachetée de la défaite, elle appartenait à l’Otan, et j’étais le premier fils d’un fils d’Italie d’Amérique, leur association, qui allait étudier au pays et obtenait sa licence. Mais ici, la licence est une tout autre chose. Ici, on ne fait pas de licenciés, on fait des profes- sionnels. » Il existe entre le licencié et le professionnel une question encore ouverte, et personne ne sait si elle se résoudra un jour.

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